Un disque à paraitre en 2021
Après le très réussi « Corsican trio invite Bastien Ribot » sorti il y a 5 ans déjà, le jeune guitariste Fanou Torracinta confirme avec ce nouveau disque, cette fois sous son nom, tout le bien que l’on pensait de lui. Si William Brunard, que l’on ne présente plus, est toujours à la contrebasse, c’est Benji Winterstein qui officie maintenant à la guitare d’accompagnement ; pompiste de plus en plus demandé, il perpétue avec autorité la pompe « made in Forbach » (il n’est pas le neveu d’Hono et le fils de Popots pour rien !). Cette rythmique impériale, d’une efficacité redoutable, déroule le tapis à un Fanou constamment inspiré, ayant gagné en maturité et qui affirme une vraie originalité, imposant sa patte à la fois par son style au swing léger, mariant influences corses et manouches, mais aussi et surtout par l’apport de 7 compositions originales d’une grande fraicheur d’inspiration, entre swing (les nerveux Fast rag et C swing, bien dans la tradition swing manouche, où l’on voit que le jeune homme a des doigts) et méditations musicales apaisées expression d’un univers beaucoup plus personnel (cf Regards et Vaghjime, deux pièces en solo habitées conjugant poésie et sérénité, ou encore Inguernu ballade sentimentale ; de la belle beauté come dirait l’autre).
La guitare a toujours fait partie du patrimoine de l’île de beauté, la mazurka et la valse étant les marques de fabrique des guitaristes corses (Paulo Quillici, Antoine Bonelli et bien d’autres) ; avec Valsa Corsa magnifique valse virtuose en deux parties et Terranova, admirable boléro, Fanou célèbre la beauté de la Corse et rend un hommage enlevé et subtil à cette tradition, faisant chanter ses notes qu’il sculpte avec une belle sensibilité, laissant toujours la musique respirer ; c’est assez rare pour être souligné, la plupart des guitaristes de la nouvelle génération ayant tendance à confondre vitesse et musicalité. Question reprises, pas de Sweat Georgia Brown ni d’Anything but love ici mais des standards plus inhabituels comme Blues primitif d’Eddie Barclay enregistré par Django en 1947, How about you de Burton Lane (deux versions dont l’une avec le pianiste Bastien Brison, l’occasion de questions-réponses enlevées) ; un pianiste également présent et très en verve sur Love is here to stay de Gershwin et sur Honeysuckle rose.
A mon humble avis, on n’a pas fini d’entendre parler de Fanou Torracinta ; en attendant, précipitez vous sur ce disque qui fait du bien, avec beaucoup de musique dedans, offrez le pour les fêtes, parlez –en autour de vous…je sais plus quoi vous dire, moi !
Francis Couvreux